La voie des émotions - la tristesse est nécessaire
- Deroubaix Marina
- 30 juil.
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 2 sept.

Poursuivons cette série avec la tristesse, émotion que personnellement j’ai le plus de mal à laisser vivre et délivrer son message. Je la perçois souvent comme un problème dont on veut se débarrasser, un manque à combler absolument, ou une sensation désagréable que l’on peut étouffer à coup d’achats compulsifs ou de nourriture réconfortante ; je n’ai pas le temps ni l’envie de m’appesantir dessus - peut-être vous reconnaîtrez-vous aussi dans ces mots.
La tristesse est timide, sa voix est faible, elle ne crie pas comme la colère, elle n’ouvre pas les portes à coups de pied. Elle vient à pas feutrés, s’installe dans un coin et attend gentiment qu’on la reconnaisse et qu’on lui fasse de la place. C’est si facile de l’ignorer ! De ne pas lui laisser l’espace de délivrer son message, car la tristesse prend du temps, il faut arrêter de s’agiter dans tous les sens et laisser le calme revenir pour enfin percevoir son appel étranglé.
Son message principal est que quelque chose ou quelqu’un manque, qu’il y a eu une perte, parfois de manière irrémédiable. Elle demande de ralentir, de réaliser, d’intégrer, de reconnaître ; et une fois que c’est fait, de se réparer et de prendre soin de soi, et potentiellement de demander de l’aide et du soutien si on n’est pas en mesure de le faire seul(e).
Mais souvent notre rythme de vie nous fait croire que c’est superflu, qu’on n’a pas le temps, qu’on a d’autres priorités et que « ça passera ». Consacrer de l’espace et du temps à la tristesse n’est malheureusement pas quelque chose de valorisé dans notre société actuelle, ce n’est pas productif, et c’est souvent vu comme de la faiblesse ou de l’apitoiement.
Et pourtant comme toutes les émotions, elle a une fonction bien précise, c’est notre corps qui nous demande de ralentir, de prendre le temps, de chercher le soutien et le réconfort, de nous reposer.
C’est dur à entendre parce qu’on pense que ce n’est pas une priorité, qu’elle ne va rien nous imposer parce que nous sommes « forts » et qu’on peut noyer ses paroles en montant le volume de notre vie. Que si elle veut tant être entendue, elle n’a qu’à crier plus fort ; et au fond c’est ce qu’on voudrait, qu’elle soit assez visible et reconnaissable pour que ce soit socialement acceptable de lui accorder de l’attention et du temps.
Mais elle est incompressible, elle ne peut qu’être accompagnée par la main jusqu’à ce qu’elle parte ou se trouve un coin tranquille dans notre corps. Lamartine écrivait « sur les ailes du temps, la tristesse s’envole ». Elle ne peut pas le faire si on choisit de la mettre en cage, de nous couper du soutien de nos proches ou d’un(e) thérapeute parce qu’on ne veut pas être jugés, ou tout simplement parce qu’on ne sait pas quoi en faire.
Alors, que faire ?
Rien, justement. Laissez-la être, nommez-la, laissez-la délivrer son message en murmures en prenant le temps de les écouter, de les reconnaître et de les accepter. Vous avez besoin de prendre ce temps pour vous, de prendre soin de vous et de laisser votre tristesse s’ébattre en liberté en vous. Même si elle est discrète, la tristesse est nécessaire.
Et si vous avez appris à serrer les dents et à tenir coûte que coûte, sachez ceci : accueillir votre tristesse n’est pas un signe de faiblesse. C’est une force tranquille, une preuve de courage silencieux. Vous avez le droit de ralentir. Vous avez le droit de respirer. Et vous verrez, sur les ailes du temps, la tristesse finit toujours par s’envoler.



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